Les bombes ont tué 722 sottevillais et détruit 70% de la ville

Revenons sur l’effroyable bombardement du 19 avril 1944, qui a transformé Sotteville-lès-Rouen en un champ de décombres, avec son chapelet de morts, de blessés, de disparus et de sans-abri…

Pendant la seconde guerre mondiale, l’aviation allemande puis alliée ont bombardé à 38 reprises les installations ferroviaires, mais aussi (et surtout) la ville par manque de précision.

Mais, le bombardement de la nuit du 18 au 19 avril 1944 a été le plus terrible. En trois quarts d’heure, l’aviation anglo-américaine a provoqué l’apocalypse sur Sotteville : la ville est dévastée et le centre-ville a quasiment disparu.

Bombardement de Sotteville-lès-Rouen

Pour l’occupant, le chemin de fer de Sotteville était stratégique. La gare de triage (l’une des plus grande d’Europe à cette époque), ainsi que les ateliers d’entretien et de construction de matériel ferroviaire, était  utilisée par les armées allemandes, car le matériel et surtout la main d’œuvre étaient très précieux.
Afin de préparer le débarquement de Normandie (et retarder les renforts allemands), l’objectif des alliés était donc de détruire cet important nœud ferroviaire.

bombardement gare de triage sotteville

Peu après minuit, les ronflements des 273 bombardiers Lancaster venus d’Angleterre ont commencé à se faire entendre, mais c’est seulement à 0 h 16, que l’alerte a été donnée. La population, surprise dans son sommeil, n’a ni le temps de sortir ni de s’abriter.
Dans un premier temps, des fusées éclairantes, des TI’s, étaient lancées pour marquer les zones à bombarder, mais des erreurs de marquage étaient à déplorer (surtout au Nord). Le léger vent les a aussi dispersées sur la ville.
Les deux objectifs ont ensuite été bombardés : l’objectif Sud à partir de 0h20 (partie de la gare de triage située entre la gare voyageurs et les ateliers de Quatre Mares), puis l’objectif Nord à partir de 0h40 (dépôt des locomotives).
6000 bombes ont été larguées sur Rouen, Bonsecours, Amfreville-la-Mivoie, Saint‑Etienne du Rouvray, Petit Quevilly, Grand Quevilly et Bois‑Guillaume.
3800 bombes sont tombées sur Sotteville-lès-Rouen. La gare de triage n’a pas subi autant qu’elle aurait dû en tant que cible (338 bombes seulement !), et ce sont les quartiers du « vieux Sotteville » aux abords de celle-ci qui ont été les plus atteints.

Il faut dire que chaque bombe avait de grandes chances de provoquer des dommages collatéraux car
– Elle était considérée dans la cible si elle tombait à moins de 500m de part et d’autre de celle-ci – soit une envergure de 1000m – mais la gare de triage ne faisait que 300m de large !
– Le choix obscur a été fait : aborder la gare de triage avec un angle de 30°, et non en enfilade.
– À une vitesse de 380 km/h, un avion met 3 secondes à parcourir les 500 mètres qui séparent la gare de triage et le centre-ville. Pas évident donc de larguer les bombes au bon moment !

sotteville-lès-rouen détruite par les bombardements

Plan des destructions par bombardements et démolitions lors de la Reconstruction. On constate que ce sont les quartiers proches des voies de chemin de fer qui ont le plus souffert… Cliquez pour agrandir :

Carte des destructions de Sotteville-lès-Rouen pendant la seconde guerre mondiale

Cette nuit du 18 au 19 avril 1944 était une opération d’envergure qui comprenait aussi les installations ferroviaires de Tergnier, Juvisy et Noisy-le-sec. En avril et mai, ce sont au total 37 triages de France, Belgique et Allemagne de l’ouest qui ont été détruits.

Le bilan du bombardement du 19 avril 1944 a été évalué par la commune de Sotteville-lès-Rouen à 561 morts, 14 disparus, 226 blessés graves, 1575 sinistrés et une centaine de blessés légers, mais le nombre de victimes a dû être plus élevé, car deux ans après on retrouverait encore des cadavres dans les décombres…

Sotteville a été libérée le 31 août 1944. Le bilan de la guerre est lourd : 722 morts sous les bombes, un tiers des habitations détruites et un tiers trop endommagées pour être reconstruites.

Si le sujet vous intéresse, vous pouvez lire le livre très précis de Paul Le Trevier et Daniel Rose : « Ce qui s’est vraiment passé le 19 avril 1944 »

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8 commentaires

  1. Merci pour ce remarquable exercice de devoir de mémoire. Je connais une personne âgée qui a perdu sa mère et son frère ensemble lors de l’un de ces bombardements, sa maison a été détruite. Alors que nous en discutions une fois, elle m’a dit à la libération, j’étais triste.

  2. Bonjour. Pouvez-vous me dire si une liste des personnes décédées ou disparues ou blessées a été réalisée ? Est-ce que cette liste est disponible ? J’ai une ancêtre FORTUNE Odette qui avait 23 ans le jour du bombardement qui est portée disparue.J’aurai aimé savoir si son corps avait été retrouvé ? Merci d’avance pour vos réponse. Bien cordialement. Cyrille

    • Bonjour,
      Peut-être existe-t-il une liste plus détaillées aux archives municipales, mais la mairie avait réalisé une stèle commémorative du bombardement du 19 avril 44 où figurent les victimes. Malheureusement je ne vois pas ce nom…
      ►https://sottevilleaufildutemps.wordpress.com/2015/04/19/commemoration-du-bombardement-du-19-avril-1944/
      Laurent

  3. J’avais 4ans et ma mere a ete blessée je suis partie chercher du secours et je ne l’ai jamais revue.longtemps j’ai cru que cc’etait les Allemands les auteurs de sa mort et je decouvre la verite maintenant.quel succés?

  4. Bonjour, née en 1937 à Sotteville, j’ai toujours des souvenirs et surtout le mal , le chagrin qu’a eu mon grand-père, propriétaire de sa maison détruite rue Benjamin Francklin et JAMAIS RECONSTRUITE ni indemnisé car on ne lui proposait qu’un appartement en immeuble, alors qu’il avait une maison et UNE FEMME MALADE, impotente. Mes parents, locataires, sinistré total, maison détruite rue Victor Hugo. Heureusement, les civils avaient été évacués d’office mais …SVP en QUELLE ANNEE ? Merci si je peux avoir la date.

  5. Renée Gallas Tafforeau. Mes parents habitaient derrière la mairie de Sotteville la rue Pouchet je crois. Nous avons tout perdu lors de cet épouvantable bombardement. Seul mon père travaillant à Buddicum -était présent dans la ville. Il avait eu la bonne idée d’aller (au cours de la soirée du 13 avril) chez mes grands Parents qui habitaient sur les hauteurs. Ce n’est qu’au petit jour qu’il avait constaté les horreurs de ce bombardement et qu’il avait avec d’autres personnes commencé à chercher des survivants..Tout cela de sinistre mémoire…

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